Histoire du Kendo
XVIᵉ – XVIIIᵉ siècle : des écoles traditionnelles au kendo moderne
Contrairement à d’autres arts martiaux japonais qui reposent sur l’enseignement d’un seul maître fondateur, le kendo s’est construit grâce à l’expérience collective de nombreux pratiquants.
Avant l’époque Tokugawa (1603-1867), le Japon comptait des milliers de ryu (écoles), chacune avec sa propre approche. La plupart privilégiaient les katas – des exercices codifiés au sabre ou au bokken – plutôt que le combat réel. Le duel à mort restait la seule véritable épreuve de compétence, mais il était risqué et, à terme, interdit.
C’est à cette époque qu’apparaît une innovation majeure : le shinaï, un sabre de bambou, associé progressivement à un équipement protecteur. Cela permet de pratiquer des combats réalistes sans danger mortel. Ce type d’entraînement, appelé shinaï geiko, est l’ancêtre direct du kendo moderne.
Vers 1668, le mot « kendo » est employé pour la première fois par Abe Gorodayu (fondateur de l’Abe Ryu) et Yamanushi Renshinsai (fondateur du Heigo Muteki Ryu). Le kendo devient alors populaire au-delà de la caste des guerriers, avec plus de 500 écoles spécialisées dans le shinaï créées à travers le Japon.
XIXᵉ siècle : entre tradition et sport
À la fin de l’époque Edo, le kendo évolue vers une pratique plus sportive, encouragée par le gouvernement Tokugawa pour canaliser les énergies des jeunes samouraïs. Mais certains maîtres dénoncent cette dérive, craignant que la recherche de points en shiaï (combats arbitrés) fasse perdre l’esprit martial originel.
Avec l’ère Meiji (1868-1912) et l’ouverture du Japon à l’Occident, les arts martiaux passent de mode. En 1876, le port du sabre est même interdit. Pourtant, quelques passionnés continuent à transmettre la pratique.
À la fin du siècle, le gouvernement lui-même redécouvre la valeur culturelle et éducative du kendo. En 1895, est fondé le Dai Nippon Butokukai (Association pour la préservation des vertus martiales), qui ouvre en 1899 le Butokuden à Kyoto, un grand centre d’entraînement. Le kendo et le judo sont progressivement intégrés dans l’éducation.
XXᵉ siècle : standardisation et diffusion mondiale
En 1906, une commission de maîtres élabore un premier kata standard de kendo, afin d’unifier les bases techniques issues des grands courants. En 1912, naît le Dai Nippon Teikoku Kendo Kata, encore pratiqué aujourd’hui.
Le kendo devient obligatoire dans les collèges japonais (1911) puis dans les écoles primaires (1941). Cependant, après la défaite de 1945, les forces alliées interdisent les arts martiaux jugés militaristes. Le Butokukai est dissous.
La pratique renaît rapidement : dès 1952 est créée la Zen Nihon Kendo Renmei (Fédération japonaise de kendo), qui pose les bases du kendo moderne. Dans les années 1960, le kendo connaît un fort regain de popularité, au Japon comme à l’étranger.
En 1971, il devient véritablement international, avec la création de compétitions et de fédérations dans de nombreux pays.
Aujourd’hui, le kendo est à la fois un sport, un art martial et une voie de développement personnel, fidèle à son héritage tout en étant tourné vers l’avenir.